À l’occasion du 81ᵉ anniversaire du massacre de Thiaroye, Pr Mamadou Diouf a appelé à une relecture courageuse de cette tragédie, plaidant pour la reconnaissance des crimes coloniaux et pour une mémoire panafricaine pleinement assumée.

À l’occasion de la cérémonie marquant le 81ᵉ anniversaire du massacre de Thiaroye, Mamadou Diouf, président du Comité pour la commémoration du massacre des tirailleurs sénégalais, a lancé un appel fort en faveur d’une relecture lucide et courageuse de cette page sombre de l’histoire coloniale. Présent ce 1er décembre au camp militaire de Thiaroye, il a insisté sur la nécessité de « rétablir la vérité » et de replacer cet événement au cœur d’une réflexion mémorielle élargie.

Dans son discours, Pr Mamadou Diouf a d’abord salué la décision du Président de la République, Bassirou Diomaye Faye, d’inscrire officiellement la date du 1er décembre dans le calendrier républicain. Une décision qu’il juge fondamentale pour « entretenir la mémoire, interroger les archives, confronter l’histoire aux fabulations, traquer les mensonges et mettre en lumière les dissimulations ».

Selon lui, les zones d’ombre persistantes autour du massacre de 1944 doivent désormais faire l’objet d’une attention accrue, dans une dynamique régionale capable d’alimenter les projets africains, qu’ils soient politiques, économiques, culturels ou sociaux. « Il s’agit de promouvoir des humanités africaines qui portent un commentaire africain et affirment une présence africaine sur la scène du monde », a-t-il déclaré.

Reconnaissance des crimes coloniaux et exigence de justice mémorielle

Poursuivant son allocution, le président du Comité de commémoration a affirmé s’inscrire pleinement dans la vision du Chef de l’État, rappelant que la « démocratie mémorielle » constitue un pilier essentiel de la politique étrangère sénégalaise.

À ce titre, il a appelé les États africains à « s’engager résolument » pour obtenir la reconnaissance officielle des crimes coloniaux et, en particulier, du massacre de Thiaroye.

Il a également insisté sur la nécessité d’exiger des excuses des anciennes puissances coloniales et d’engager des discussions sur les réparations légitimes dues aux victimes et à leurs descendants.

Thiaroye, un repère mémoriel régional et continental

Pour le Professeur Diouf, Thiaroye ne doit plus être perçu comme un événement isolé, mais comme le noyau d’une « constellation historique et mémorielle » dont l’influence s’étend à l’Afrique de l’Ouest, au continent tout entier et, au-delà, à l’ancien Empire colonial français.

Il estime qu’une commémoration à l’échelle régionale s’impose désormais, soutenue par les recommandations du Livre blanc, qui pourrait constituer le socle d’un programme ambitieux de recherche et de transmission.

Pr Mamadou Diouf a insisté sur l’impératif de penser l’avenir de la mémoire de Thiaroye.

Selon lui, le devoir prescrit consiste à poursuivre les recherches historiques, à encourager la création artistique et littéraire, et à développer des initiatives pédagogiques en langues nationales comme en langue officielle, afin d’ancrer cette mémoire dans les consciences des générations futures.

Une commémoration placée sous le signe du recueillement et de la diplomatie

La cérémonie s’est déroulée au camp militaire de Thiaroye, en présence du Chef de l’État. Avant de rejoindre le lieu de commémoration, Bassirou Diomaye Faye s’était recueilli au cimetière des tirailleurs, où il a déposé une gerbe de fleurs à la mémoire des soldats exécutés en 1944.

Le Président gambien Adama Barrow, ainsi que des représentants de plusieurs pays d’origine des tirailleurs, avaient précédé le chef de l’État sur les lieux. Le Président de l’Assemblée nationale, Malick Ndiaye, et le Premier ministre Ousmane Sonko étaient également présents, aux côtés de membres du gouvernement, de diplomates, d’officiers supérieurs, de députés et d’élus territoriaux.