
AÏSSATA TALL SALL APPELLE À LA PRUDENCE : « L’ASSEMBLÉE NATIONALE FAIT OFFICE DE PROCUREUR, SACHONS LA GRAVITÉ DE NOTRE RESPONSABILITÉ »

Lors du débat en séance plénière sur la mise en accusation de cinq anciens ministres devant la Haute Cour de justice, la députée Aïssata Tall Sall a livré une intervention empreinte de solennité et de mise en garde. Elle a rappelé à ses collègues la portée exceptionnelle de la procédure engagée, insistant sur les caractéristiques singulières de la juridiction concernée.
« La Haute Cour de justice est une juridiction d’exception. Elle statue en premier et dernier ressort. Il n’y a ni appel, ni cassation, sauf révision. Cela signifie que nous devons réfléchir avec rigueur avant d’envoyer quelqu’un devant cette cour », a-t-elle déclaré, soulignant que les conséquences d’une telle décision sont irréversibles.
Mais plus encore, l’ancienne ministre a insisté sur le rôle que joue l’Assemblée nationale dans ce processus, allant jusqu’à affirmer que, dans ce contexte, les députés « font office de procureur de la République », puisque c’est eux qui initient la mise en accusation, ouvrant ainsi la voie à une procédure judiciaire formelle.
« J’entends dire que nous ne sommes pas la justice. Mais aujourd’hui, nous le sommes. Nous prenons la place du procureur en décidant de qui doit être poursuivi. Il n’y a plus de séparation des pouvoirs à cet instant précis », a averti la députée.
Face à cette responsabilité, elle a rappelé un principe fondamental du droit pénal : la présomption d’innocence. Pour Aïssata Tall Sall, ce principe est trop souvent mal interprété. « La présomption d’innocence, ce n’est pas juste dire que quelqu’un est innocent jusqu’à jugement. C’est surtout refuser de briser cette présomption sans preuves tangibles. »
Elle a exprimé des réserves sur les éléments soumis à l’appréciation des députés, notamment le fait que les accusations reposent en grande partie sur des déclarations de Directeurs administratifs et financiers (DAGE), sans corroboration formelle. « Il n’y a pas eu d’enquête contradictoire sérieuse à ce stade. Ce sont des déclarations contre des déclarations. »
« Nous devons savoir ce qu’on nous demande de faire avant de prendre une décision aussi lourde de conséquences », a-t-elle conclu, appelant à la responsabilité, à l’équité et à la conscience du droit dans le traitement de cette affaire.