Au Forum mondial de l’Économie sociale et solidaire (GSEF 2025) de Bordeaux, le ministre de la Microfinance, de l’Économie sociale et solidaire, Dr Alioune Badara Dione, a présenté la vision du Sénégal pour faire de l’ESS un levier de développement inclusif, durable et souverain, à l’échelle nationale, africaine et internationale.

Le ministre sénégalais de la Microfinance, de l’Économie sociale et solidaire, Dr Alioune Badara Dione, a livré une intervention remarquée au Forum mondial de l’Économie sociale et solidaire (GSEF 2025) de Bordeaux, autour du thème « Les dynamiques gouvernementales à l’œuvre en faveur de l’ESS ».

À quelques jours du Forum social mondial de Doha, cette allocution a réaffirmé la volonté du Sénégal de placer l’Économie sociale et solidaire (ESS) au cœur des stratégies nationales et internationales de développement durable.

Une diplomatie proactive pour la reconnaissance internationale de l’ESS

Dr Dione a d’abord rappelé que les États restent souvent en retrait dans la promotion de l’ESS, un champ longtemps porté par les collectivités territoriales, la société civile et le monde académique. Or, à l’heure où les Nations Unies appellent les États, les organisations régionales et la société civile à unir leurs forces, il est essentiel, selon lui, de dépasser cette phase de maturation pour intégrer pleinement l’ESS dans les politiques publiques.

Le Sénégal s’inscrit dans cette dynamique à travers une diplomatie active. Sur la scène internationale, le gouvernement soutient résolument les initiatives et résolutions de l’ONU et de l’Union africaine en faveur de l’ESS, tout en participant régulièrement aux grands forums dédiés. Il mise également sur la coopération Sud-Sud pour partager les expériences et renforcer les synergies africaines.

Cette stratégie s’accompagne d’une politique de coopération renforcée avec les partenaires techniques et financiers. Le Sénégal présente désormais des projets ESS structurants alignés sur les Objectifs de développement durable, destinés à favoriser la production solidaire, l’innovation sociale et la mutualisation des ressources.

Le ministre a également annoncé la participation du pays à deux événements parallèles lors du Sommet de Doha, dans la continuité de la présence sénégalaise remarquée au Sommet de Séville sur le financement du développement. Ces engagements visent à accroître la visibilité internationale de l’ESS africaine et à en démontrer les bénéfices pour la prospérité partagée.

Une dynamique continentale portée par la coopération et l’innovation

L’intervention du Dr Dione s’est également inscrite dans une perspective continentale. Le ministre a salué la Stratégie décennale de l’Union africaine pour l’Économie sociale et solidaire (2023-2032), véritable cadre d’action collective pour le continent.

Le Sénégal y joue un rôle moteur, participant activement aux rendez-vous phares tels que le FORAESS de Yaoundé en 2024 et se préparant à celui de Brazzaville en 2026.

Le pays multiplie les partenariats avec d’autres États africains, comme la Côte d’Ivoire, le Congo, le Maroc et le Kenya, à travers des forums, visites de benchmarking et conférences ministérielles. Cette coopération vise à consolider un modèle africain de l’ESS fondé sur l’autonomie économique, l’emploi local et la solidarité territoriale.

Le ministre a mis l’accent sur la nécessité d’un financement innovant, capable de répondre aux besoins spécifiques des structures de l’ESS. Le Sénégal travaille ainsi avec le Tony Blair Institute pour présenter ses projets à des bailleurs sociaux et mobiliser des ressources adaptées. Parallèlement, une collaboration avec le Bureau international du travail (BIT) à Dakar donne naissance au projet FORC’ESS, destiné à formaliser les organisations communautaires de l’ESS.

Le gouvernement prévoit par ailleurs, dès 2026, la mise en place d’outils de mesure d’impact pour évaluer la contribution du secteur au produit intérieur brut (PIB) national, dans une logique de transparence et de performance.

Une politique nationale structurée autour d’un modèle endogène

Dr Alioune Badara Dione a réaffirmé la place centrale de l’Économie sociale et solidaire dans les politiques publiques sénégalaises. L’ESS s’inscrit au cœur de l’Agenda 2050, de la Stratégie nationale de développement 2025-2029 et de la Lettre de politique sectorielle (LPS) 2025-2029, où elle est présentée comme un moteur de transformation économique, de création d’emplois et de cohésion sociale.

Ce modèle repose sur des piliers concrets. Les Coopératives productives solidaires (CPS) incarnent l’ancrage territorial de l’ESS en fédérant producteurs, transformateurs et artisans autour de la mutualisation, de la production solidaire et de la valorisation des ressources locales. Ces structures, accompagnées dans la formation, l’incubation et la certification, participent à la construction d’une économie locale durable et compétitive.

Le dispositif est renforcé par une stratégie de financement ciblé, qui favorise la bancarisation des acteurs de l’ESS et leur accès durable aux capitaux. Des incubateurs ESS se déploient progressivement dans les territoires pour soutenir les projets à fort impact social portés par les jeunes et les femmes, moteurs d’innovation et d’autonomisation économique.

Sur le plan institutionnel, le Sénégal a mis en place un système d’agrément ESS, déjà attribué à plus de 560 structures, garantissant transparence et gouvernance. Plusieurs instruments soutiennent cette politique : le Fonds d’appui à l’Économie sociale (FAESS), le Programme d’appui PROGRESS, le Fonds national de la Microfinance, ou encore le FDMI, qui promeut la finance islamique inclusive.

Un Observatoire national de l’ESS est également en cours de structuration pour assurer le suivi statistique, l’évaluation d’impact et la planification basée sur les données.

Vers un modèle africain d’ESS souveraine et durable

En clôturant son intervention, le ministre a rappelé la vision stratégique du Sénégal : bâtir une économie sociale et solidaire structurée, compétitive et inclusive, capable d’allier justice sociale, transition écologique et souveraineté économique.

« Notre ambition, a-t-il déclaré, est de faire du Sénégal une référence africaine en matière d’Économie sociale et solidaire, un modèle endogène fondé sur la solidarité, la durabilité et la participation citoyenne. »