Le sport sénégalais est en deuil. Maître Ankiling Diabone, monument du judo national et figure tutélaire de plusieurs générations de judokas, est décédé jeudi 20 novembre à l’Hôpital de la Paix de Ziguinchor, des suites d’une longue maladie. Il avait 70 ans. Son départ met fin à une trajectoire exceptionnelle, forgée sur les tatamis du Sénégal, d’Afrique et du monde, mais aussi dans les salles de classe et les structures sportives qu’il a dirigées.

Né en 1955 à Oussouye, le « rocher », comme on le surnommait en langue locale, restera l’un des compétiteurs les plus titrés de l’histoire du judo sénégalais : onze fois champion du Sénégal, cinq fois champion d’Afrique entre 1982 et 1987, médaillé à de nombreux tournois internationaux, double participant aux championnats du monde et à plusieurs Jeux olympiques. « Afambil », « le déménageur », ou encore « le sorcier » pour ses adversaires, incarnait la puissance, le métier et une science du combat saluée bien au-delà des frontières.

Au-delà des titres, Ankiling Diabone fut un bâtisseur. Formé au CNEPS de Thiès puis à l’INSEP de Paris, il a occupé plusieurs fonctions clés au ministère des Sports : conseiller technique régional à Dakar puis en Casamance, professeur d’EPS, directeur du stade Aline Sitoé Diatta et entraîneur national de judo dans les années 1990. Il fonde également le Judo Club Casamance, avec lequel il remporte quatre titres nationaux, contribuant fortement à l’essor de la discipline dans le Sud du pays.

Son parcours, Ankiling Diabone l’a transmis à toute une génération de judokas, dont la championne d’Afrique Hortense Diédhiou, qui peine à contenir son émotion. « C’était un père, un modèle, un mentor. Il m’a donné mon mental, ma rage de vaincre », confie-t-elle, bouleversée. Elle explique avoir rendu visite à son maître durant l’été et lui avoir présenté la jeune Marie Aguène Diatta, qu’elle considère comme sa relève. « Il était tellement content… Je comptais sur sa présence pour l’inauguration de mon centre de judo en décembre. »

Jusqu’à ses derniers mois, Ankiling Diabone nourrissait un rêve simple : terminer sa maison à Sam-Sam, profiter de la nature et accueillir chaque année ses enfants et petits-enfants vivant en Europe. Un souhait brutalement fauché.

Sa famille sportive et biologique, ses anciens élèves, ses coéquipiers et tous ceux qui ont croisé sa route saluent aujourd’hui un géant. Chevalier de l’Ordre national du Mérite, Lion d’Or en 2003, désigné « Meilleur Judoka du Cinquantenaire », Ankiling Diabone restera comme l’un des plus grands sportifs du Sénégal.